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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/119

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JACK LONDON

tenais mon couteau comme ça… Ça lui est entré dans la viande, comme dans du beurre mou. Il gueulait comme un porc !

J’étais resté sur le seuil de la porte. Le coq me regarda de côté et, certain que je l’entendais, continua :

— Il me demandait grâce et me suppliait de l’épargner. « Si je t’ai fait du tort, Tommy, disait-il, je te jure que c’est sans le vouloir ! » Mais moi, je l’ai laissé causer et je lui ai rentré dedans. Beau spectacle, tu peux me croire !

Un appel du second, qui fit déguerpir Harrison, interrompit cette histoire sanguinaire.

Lorsque je fus entré, Thomas Mugridge s’assit sur la première marche de l’escalier et recommença à repasser son couteau.

Je remis en place le cendrier et je m’assis, très calmement, en face du coq, sur la boîte à charbon. Il me lança un coup d’œil mauvais.

Moi, toujours très calme, en apparence tout au moins, car mon cœur battait à se rompre, je sortis le poignard de Louis et me mis à l’affûter sur une pierre, que j’avais dans ma poche. Je m’attendais, de la part du coq, à une explosion d’injures. Mais il n’en fut rien. À ma vive surprise, il ne parut pas prêter attention à ce que je faisais. Il continua simplement à aiguiser son couteau. J’agis de même et, deux heures durant, nous restâmes là, nez à nez, aiguisant, aiguisant, aiguisant…

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