Aller au contenu

Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/146

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
LE LOUP DES MERS

coutume, pour dire tout haut ce qu’il en pensait.

La soute aux hardes est, en miniature, une sorte de magasin de confection, qui existe sur toutes les goélettes phoquières et qui contient divers articles, à l’usage des hommes du bord. Le montant de leurs achats est retenu, ultérieurement, sur les gains réalisés par eux, dans les zones de chasse. Les chasseurs, en effet, de même que les rameurs et les hommes de barre, au lieu d’un salaire fixe, reçoivent alors tant par peau capturée par leur bateau.

J’ignorais le mécontentement de Johnson, à propos de son ciré, et les réflexions dont il l’avait assaisonné. Aussi ne m’attendais-je nullement à la scène terrible dont je fus témoin.

Je venais d’achever de balayer la cabine de Loup Larsen qui m’avait entraîné dans une discussion sur Hamlet, le personnage shakespearien qu’il préfère, pour son pessimisme forcené, j’imagine. Là-dessus, Johnson, flanqué du second, Johansen, descendit l’escalier du carré.

Selon la coutume maritime, Johnson ôta son béret et se tint dans une attitude respectueuse, au milieu de la cabine. Il se balançait lourdement au roulis de la goélette, afin de conserver son équilibre, et faisait face au capitaine.

— Fermez la porte et tirez le verrou ! me commanda Loup Larsen.

J’obéis et remarquai, sans en comprendre la cause, la lueur d’inquiétude qui passait dans les

147