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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/198

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LE LOUP DES MERS

pas fléchi. L’insatiable fureur qui le dévorait ne lui laissait pas le temps de gémir. À la seule vue de Loup Larsen, ses lèvres se crispaient en un rictus satanique, et sa gorge, inconsciemment, étouffait un rugissement rauque, tandis qu’il suivait du regard l’objet de sa haine.

Je me souviens que, sur le pont, par un beau jour ensoleillé, ayant à lui donner un ordre, je vins derrière lui et lui touchai l’épaule. Au contact de ma main, il eut un violent sursaut et bondit en avant, avec un cri féroce. Puis il se retourna et, m’ayant reconnu, il se calma. Il m’avait pris d’abord pour Loup Larsen.

Avec quelle joie lui et Johnson l’auraient tué s’ils l’avaient pu ! Mais leur ennemi restait sur ses gardes et Leach s’épuisait en inutiles tentatives. Je l’ai vu, sans avertissement ni provocation, s’élancer soudain sur Loup Larsen, comme un chat sauvage, et les deux hommes lutter des dents, des ongles et des poings.

Et toujours Leach restait finalement sur le carreau, épuisé et vaincu. Mais le diable qui l’habitait n’en continuait pas moins à défier le démon qui était en Loup Larsen. Dès qu’ils se trouvaient nez à nez sur le pont, la bataille recommençait, avec un résultat identique.

Espérant réussir mieux, Leach tenta de lancer son couteau contre la gorge de Loup Larsen qui esquiva le coup de justesse. Une autre fois, il laissa tomber, d’une des vergues du grand mât et

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