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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/399

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JACK LONDON

Puis un de ses poings se détendit, et il renouvela le geste de passer sa main sur sa figure et sur ses yeux, comme pour en chasser des toiles d’araignée.

— Dieu ! Dieu ! gémit-il.

Et il leva vers le ciel ses poings fermés, avec ce même désespoir infini qui arrachait la plainte de son gosier.

C’était horrible à voir. Je tremblais de tous mes membres. Des frissons couraient le long de ma colonne vertébrale et la sueur m’inondait le front. Je ne crois pas qu’il y ait au monde spectacle plus poignant que celui d’un homme puissant, soudain terrassé.

Par un effet de son extraordinaire volonté, Loup Larsen parvint cependant à se dominer. L’effort dut lui être terrible, car tout son corps en fut secoué. On aurait dit qu’il allait être foudroyé par une attaque.

De ses traits convulsés, il se composa un visage, crispant ses nerfs et luttant pour leur commander. Puis il s’affaissa de nouveau. Une fois de plus, les poings serrés se levèrent, accompagnés d’un gémissement sourd. Et je l’entendis qui sanglotait.

Après quoi il sembla, pour quelques minutes, redevenir l’ancien Loup Larsen et il se dirigea vers l’escalier qui montait sur le pont.

Je me blottis davantage dans l’ombre, persuadé qu’il allait me découvrir dans la position accroupie où je me trouvais, et peu flatté d’être pris pour un lâche.

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