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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/58

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Le Loup des mers

fois, reproché de mépriser la culture physique. J’avais ri de leurs conseils, préférant, au développement de mon corps, celui de mon esprit. Fâcheuse préparation à l’existence qui m’attendait.

Ce ne sont là que quelques-unes des réflexions qui me traversaient le cerveau. Et ce que j’en dis est pour me justifier des maladresses auxquelles j’étais exposé dans mon nouveau rôle.

Je songeais aussi à ma mère et à mes sœurs, et je m’imaginais facilement leur chagrin. Je comptais, à n’en pas douter, parmi les disparus de la catastrophe du Martinez, et mon corps était porté comme n’ayant pas été retrouvé.

Je voyais, de ma couchette, les titres des journaux. Les membres, mes confrères, du Club de l’Université et du Club du Bibelot, hochaient tristement la tête, en se disant de l’un à l’autre : « Le pauvre bougre ! »

Et m’apparaissait encore Charley Furuseth, la dernière personne à qui j’avais parlé avant mon départ, étendu mélancoliquement, en robe de chambre, sur sa chaise longue, près de sa fenêtre. Il se reprochait amèrement d’avoir été la cause involontaire de mon malheur…

Mais, violemment secoué, le Fantôme plongeait, franchissait des vagues, hautes comme des montagnes, puis retombait dans les vallées écumeuses et continuait à se frayer sa route au cœur du Pacifique, avec moi à son bord.

De ma couchette, je pouvais entendre, en

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