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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/59

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Jack London

sourdine, le vent mugir au-dessus de moi. De temps à autre, je percevais des pas qui résonnaient sur le pont. Ce n’étaient, de tous côtés, que craquements incessants. Toutes les boiseries et toute l’ossature du navire grondaient, criaient et geignaient sur tous les tons.

Les chasseurs de phoques poursuivaient leur discussion et grognaient tels des êtres hybrides à moitié hommes et à moitié amphibies. L’air s’emplissait de leurs jurons et de leurs obscénités. Sous la lueur jaunâtre et lugubre des lampes à huile, accrochées au plafond, qui suivaient les oscillations du navire, j’apercevais leurs faces rouges et convulsées, déformées par la pénombre.

À travers les nuages fumeux du tabac, les couchettes pratiquées dans la cloison ressemblaient à des réduits d’animaux dans une ménagerie. Cirés et bottes de mer pendaient çà et là, fusils et carabines étaient rangés dans les râteliers. Le tout formait une ambiance digne des boucaniers et des pirates de jadis.

Mon imagination battait la campagne, sans que je pusse réussir à trouver le sommeil. C’était une longue nuit, fastidieuse, incommensurable.

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