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CHAPITRE XXVI

C’EST L’AMOUR QUI M’A PERDU

Moi, Darrell Standing, je suis, à cette heure, paisiblement assis dans la cellule des condamnés à mort, à Folsom, tandis que les mouches bourdonnent autour de moi, dans l’assoupissement lourd de cet après-midi. Et je songe à toutes les femmes que j’ai aimées, tant dans cette vie que dans mes autres vies, depuis le temps des périodes géologiques, où je faisais paître mon troupeau de rennes, gardé par des loups domestiques, sur les côtes alors glacées de la Méditerranée, qui sont devenues depuis la France, l’Italie et l’Espagne.

Je revois celle que j’appelais Igar et qui, à l’époque de l’Âge du Bronze, s’accroupissait près de moi, au crépuscule, devant notre feu, tandis que je taillais et courbais les arcs en bois rouge et odorant, pareil à du bois de cèdre, ou que je fabriquais, avec des os, des flèches dentelées, destinées à transpercer les poissons dans l’eau limpide.

Je l’avais capturée de force et volée aux hommes d’une autre tribu. Tandis qu’elle marchait lentement, parmi l’herbe de la jungle, je me jetai sur elle, d’une branche d’arbre surplombante, où j’étais posté en embuscade. Je tombai en plein sur ses épaules, de tout le poids de mon corps, et je m’agrippai à elle, de mes mains crispées. Elle piaula comme un chat, renversée dans l’herbe haute. Elle se débattit et me mordit furieu-