Page:London - Les Vagabonds du rail, 1974.djvu/195

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étaient proportionnellement plus grands. En tant que pilleur d’huîtres, j’avais déjà récolté des condamnations qui m’eussent valu, si j’avais dû les purger, un séjour d’un millier d’années dans les prisons d’État. Voler était un acte viril ; mendier était sordide et méprisable. Mais je devais modifier plus tard cette façon de voir ; je finis par considérer la mendicité comme une joyeuse farce, une aimable plaisanterie, une gymnastique de l’audace.

J’avoue humblement que le premier soir je ne fus pas à la hauteur de ma tâche. Les autres vagabonds avaient gagné leur pitance alors que je n’avais pu me résoudre à soutirer un sou aux bonnes âmes. Meiny-Kid m’ayant avancé le prix d’un repas, je pus rejoindre la bande au restaurant. Mais, tout en mangeant, je réfléchissais. Le receleur, dit-on, ne vaut pas mieux que le voleur. Or, Meiny-Kid avait mendié et je bénéficiais de son acte. J’étais donc bien pire que lui. Pareille chose ne se renouvellerait plus. En effet, le lendemain et les jours suivants je quémandais, tout comme les autres.

Nickey-le-Grec ne se sentait pas la vocation du trimard. La mendicité n’étant pas son fort, il sauta une nuit sur un chaland