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CHEZ LES FORÇATS
QUI SONT NUS


Il s’appelait ben Kadour. C’était un sidi.

En sa qualité de pousseur-chef de Saint-Laurent-du-Maroni, je le fréquentais toute la journée.

Chaque matin, à six heures, ben Kadour, appuyé sur son carrosse, m’attendait au bout de la rue de la République.

Ce carrosse à quatre roues minuscules roulait sur rails Decauville. C’est le pousse, car il ne roule que lorsqu’on le pousse. Tantôt il parcourt les dix-sept kilomètres jusqu’à Saint-Jean, tantôt les vingt-deux, jusqu’à Charvein. Saluons très bas ce véhicule. C’est l’unique moyen de transport en Guyane française.

Ben Kadour et ses deux aides poussaient ferme. À travers la brousse nous allions à Charvein, chez les Incos.

— Ah ! ça, Charvein, me disait un forçat, à Royale, c’est le bagne aussi !

Et presque avec une pointe d’admiration :

— Il faut être Français pour avoir trouvé ça !