Page:Londres - Au bagne.djvu/160

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est un verre de tafia). L’un faisait le matamore.

— Après tout, lui dit son compagnon, tu n’es qu’un pied-de-biche comme moi.

Le matamore ne pipa plus.

Ce sont les honteux du bagne, de pauvres petits voleurs enfoncés dans l’anonymat. L’auréole de la guillotine n’a pas brillé au-dessus de leur tête. La considération, ici, ne commence qu’au vol qualifié.

La rélégation ! Je ne m’imaginais pas que c’était ainsi. Quand on lit : « Condamné à tant et à dix ans d’interdiction de séjour », on croit aisément qu’une fois sa peine achevée, l’homme n’a qu’à courir le monde pourvu qu’il ne rentre pas en France. Ce n’est pas cela. Il va à Saint-Jean, dit Saint-Flour.

Ce n’est pas que Saint-Jean soit laid. C’est joli. C’est même zoli ; zoli ! comme on dit à Athènes.

Sur la gauche du Maroni, un large espace fut débroussé et sept collines apparurent. Et comme, en ces lieux, le toupet ne manque pas, en plus de Saint-Flour, on appela Saint-Jean : la petite Suisse. Des bungalows sommeillent à l’ombre des manguiers. La flore tropicale décore au ras du sol. Une route poil de carotte, mais bien peignée, conduit de vallon en vallon. Et, plus loin, au fond, sur le quatrième plateau — ce que nous venons de passer est le quartier administratif — s’élèvent quinze grandes cases, hautes sur pattes : le séjour de MM. les interdits de séjour.

Le pasteur protestant qui vient de débarquer en