La loi prévoit que le transporté libéré pourra recevoir une concession.
Bravo !
Or, à ce jour, l’effectif des libérés est 2.448.
Souvenez-vous, s’il vous plait, de ce troupeau hagard d’hommes avilis que je vous montrais, l’autre jour, rôdant par les rues indifférentes et cruelles de Saint-Laurent-du-Maroni.
Deux mille quatre cent quarante-huit blancs sans toit, sans vêtement — évidemment, ils ne se promènent pas tout nus — sans vêtement quand même, sans pâture, sans travail et sans l’espoir d’une embauche. Tous ont faim. Ce sont des chiens sans propriétaire.
Leur peine est finie. Ils ont payé. A-t-on le droit, pour la même faute, de condamner un homme deux fois ?
Laissons la théorie. Regardons encore la réalité.
Deux mille quatre cent quarante-huit individus, le moral anéanti, le physique dégradé, et vivant comme des bêtes galeuses qu’on chasse de toutes parts. On leur a assigné un espace et, dans cet espace, ils grouillent, ils maudissent le jour, ils se saoulent, ils s’entre-tuent. Voilà l’amendement !
Ils sont assis sur ce trottoir, sombres lazaroni. Vous passez, ils ouvrent un œil et se rendorment. Voilà la colonisation !
Pourquoi ?
Parce que les concessions, c’est de la blague ! On en compte sept ou huit (2.448 libérés !).