Page:Londres - Au bagne.djvu/24

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bientôt on perçut des paroles sur la mer. Les hommes causaient. Une voix plus forte que les autres dit :

— Barre à droite !

Et ils atteignirent notre échelle.

Plusieurs avaient le torse nu et d’autres une camisole de grosse toile estampillée d’un long chiffre à la place du cœur. C’était les canotiers, les forçats canotiers, qui venaient chercher le courrier.

Ils firent glisser les paquets le long de la coupée et les rangèrent dans les barques.

— Prenez garde ! dit le maigre qui était au sommet de l’échelle, voilà les « recommandés ».

Je cherchai le surveillant revolver au côté. Absent !

Treize hommes qui maintenant n’avaient plus, comme étiquette sociale, que celle de bandits, étaient là, dans la nuit, maîtres de deux canots et coltinaient officiellement, sous leur seule responsabilité, des centaines de millions de francs scellés d’un cachet de cire dans des sacs postaux.

— Descendez avec moi, me dit Decens, le contrôleur, qui devait accompagner ses sacs jusqu’à la poste. Vous ne trouverez pas à vous loger et, à moins que vous ne couchiez place des Palmistes, vous en serez quitte pour remonter à bord.

Les forçats se mirent à leurs rames. Nous prîmes place sur les sacs.

— Tassez-vous, chefs ! cria un forçat.

On se tassa.