Page:Londres - Dante n’avait rien vu.djvu/189

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riture des artichauts sauvages. À ma vue, la population décampa. Je me suis dit : on va te tuer ! Je levai une main comme l’on fait dans le pays. Ce sont les enfants qui avaient fui et les femmes. Je n’avais pas vu d’hommes chleuhs encore. J’avais jeté mon képi, bien entendu. Le soleil m’avait tapé dessus et j’avais bien mal à la tête. Hé ! savez-vous bien que j’étais très malheureux ! Ils ne m’ont pas tué, non, c’est une race intelligente. Ils ont compris que j’étais un perdu, et que je ne leur voulais pas de mal… J’ai gardé leurs troupeaux, j’ai réparé leurs bricoles. Je n’ai pas cherché leurs femmes. J’y suis resté sept ans.

» Ils parlaient bien de barouds (de batailles), je croyais que c’étaient des batailles du Maroc. C’est pendant ce temps que j’ai vu manœuvrer les Allemands, quatre dans mes sept ans. Je n’étais pas très calé sur ces histoires de nations, aussi le premier n’a fait que m’épater. C’était un matin. Qu’est-ce que je vois dans le village ?… un Français ! Je veux dire un type que je croyais français. Je vais lui dire bonjour. Il parlait français, mais pas très bien. Il me demande ce que je fais ici. Je lui dis tout. Et il s’en va sans plus s’intéresser à moi.