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À CHARLES GUÉRIN

À mon ami que je n’ai pas connu
Et que j’aimai dès les bancs du collège,
Je fais l’envoi de mon vers ingénu.
Qu’il me pardonne, au fond, ce sacrilège,
Car il sait bien que le poète est bon,
Et que, devant la tombe de son frère,
Celui qui reste ne peut pas moins faire
Que de crier à l’abandon.
Charles Guérin ! Charles Guérin mon frère
Pareil à toi, j’ai le cœur solitaire.
Je ne veux pas que la foule aux abois
Trempe sa lèvre aux sources de sa flamme,
C’est pour cela que j’arrête ma voix
Quand elle est prête à dévoiler mon âme,
Poète mort qui m’aurais bien compris,
Ne m’en veux pas, si, penché sur ton herbe,
Je viens y déposer ma gerbe,
Comme ont fait tes autres amis.