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Page:Londres - L’Âme qui vibre, 1908.djvu/76

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L’ÂME QUI VIBRE


J’en ai froissé des faux cheveux, des cheveux teints !
Mais je n’ai jamais sur la paille,
Au soir tombant, par la fraîcheur et sans témoins,
Fait courber la robuste taille
D’une fille des champs qui, de retour des foins,
Sans préambule et sans manière,
Se laisserait faucher parmi les gerbes d’or.

Allons, en route, ami, j’en ai le temps encor.
Je vais aller voir ma fermière.

Déjà ! mon Dieu ! j’ai déjà gravi la colline !
J’ai contemplé la main du soir qui la câline,
J’ai percé de mes doigts le crépuscule épais,
Et le soleil s’en est allé dormir en paix.
Il a bien fait. Il m’aveuglait.
L’oiseau qui passe !
C’est mon âme qui fuit en dévorant l’espace.
Il faut qu’elle aille ! Et je la jette sur les vents.
Qu’ils l’emportent vers d’autres milieux plus savants.
Puis, un soir que je sais, un soir de lune pâle,
Je reviendrai pour qu’ils me la rendent plus mâle.
Qu’ils la traînent partout. J’ai le cœur endurci,
Qu’ils la ballottent bien pour me la rendre ainsi.