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TERRE D’ÉBÈNE

Et pendant la guerre c’était parfois son maître qui, tenant lieu de parents, touchait l’allocation !

C’est le captif qui constitue les compagnies de travailleurs. Là, il en a pour deux ans. C’est lui qui creuse le canal de Sotuba. Lui qui a fait et lui qui fait les chemins de fer du Sénégal, du Soudan, de la Guinée, de la Côte d’Ivoire, du Togo, du Dahomey. Du Congo ! Nous arriverons au Congo, soyez patients ; nous aurons chaud, mais ce ne sera pas pour rien !

L’argent qu’il reçoit, il le remet à son chef. C’est le captif qui ouvre les routes et les répare. C’est lui qui m’a porté, ainsi que mes caisses de conserves et ma valise. Ma pauvre chère vieille valise en peau de cochon, avais-tu l’air assez ahuri sur la tête de Mamadou, à travers la grande forêt !

C’est le captif qui, pendant des jours, arpente la savane, trente kilos de manioc en charge, suivi de ses femmes et de ses enfants, lamentable kyrielle pour ravitailler les chantiers de la civilisation !

Un camion ferait beaucoup mieux l’affaire. Mais l’essence revient à des prix fous, tandis qu’il y a beaucoup de bananiers. Lui, c’est le moteur à bananes !

Quand il n’y a plus d’hommes dans les villages