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n’être pas ; et comment tirerait-on vanité d’une chose qui peut ne durer qu’un jour ?… Je ferai du bien à ton époux autant par affection que par reconnaissance.

Nicèle.

Voici le roi.

Joseph.

Éloigne-toi un moment ; je vais lui parler selon tes désirs.

Nicèle.

Daigne oublier que c’est par moi que tu as souffert. Souviens-toi seulement que je suis la cause indirecte de ton élévation ; car, par suite de ma méchanceté, tu es sorti de prison pour monter sur le trône.

Elle s’éloigne.


Entre PHARAON. Joseph va pour se mettre à genoux ; le Roi l’en empêche.
Pharaon.

Joseph, j’ai à me plaindre de toi. N’eût-il pas été juste que tu apprisses à ton roi ces heureuses nouvelles ?

Joseph.

Quelles nouvelles, seigneur ?

Pharaon.

Naguère, lorsque tes frères ont dû retourner dans leur pays, je les ai comblés de présents ; je leur ai donné de l’or, de l’argent, de riches habits, et en même temps mes chars, mes éléphants et mes chameaux pour ramener ici avec plus de pompe le vieux Jacob ton père. Il est ici, et tu ne me dis point son arrivée.

Joseph.

Tu te plains de ma négligence, pour m’apprendre à moi-même la nouvelle que j’attendais. — Je vais voir le vieux Jacob mon père. Mais, auparavant, j’ai une grâce à te demander.

Pharaon.

Que puis-je te donner ?

Joseph.

Les rois sont les obligés de ceux qui les servent avec amour et fidélité, et je demande une récompense pour mes services.

Pharaon.

Que veux-tu ?

Joseph.

Approche, Nicèle. (Au Roi.) Le général, son époux, t’a constamment servi avec dévouement dans la paix et dans la guerre, et, comme tu sais, il a été mon maître.

Pharaon.

Tu es mon vice-roi ; qu’il soit ton lieutenant et qu’il préside mon conseil.

Nicèle.

Je te baise humblement les pieds.