Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/86

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Le Capitaine.

Jamais de la vie je n’ai trompé une femme.

Phénice.

Ah ! je me confie à votre sincérité espagnole. — Si ce mariage a lieu, je vous donnerai le jour même une chaîne valant mille ducats.

Le Capitaine.

J’ai dit à don Juan que vous êtes fort riche.

Phénice.

Vous ne l’avez pas trompé ; car, à dire vrai, si nous devions nous marier ce soir même, je me ferais fort de lui apporter en dot quinze mille ducats aussi bien qu’un.


Entre TRISTAN.
Tristan, à Phénice.

Lucindo mon maître vous attend à la douane.

Phénice.

Venez, Capitaine. — Toi, Célia, dis à Estacio et à Fabricio qu’ils me suivent avec l’argent.

Le Capitaine.

Laissez-moi prendre congé de don Juan.

Phénice.

Dites-lui donc qu’il est l’âme de ma vie.

Dinarda.

Qu’y a-t-il de nouveau ?

Le Capitaine.

Nous allons, Phénice et moi, à une affaire obligée. (Plus bas.) Elle est folle de vous, don Juan. Elle m’a promis une chaîne de mille ducats. Demeurez ici.

Dinarda.

Que le ciel vous garde.

Phénice.

Ne tardons pas davantage.

Tristan, à part.

Nous la tenons ! elle est prise !

Phénice, le Capitaine, Tristan et Célia sortent.
Dinarda.

Je perds en vain mes pas, mes soupirs et mes pleurs. Il ne me reste plus désormais aucune épreuve à traverser ; car j’ai souffert tous les ennuis, toutes les peines. Si l’amour est dans la pensée, il n’y a rien d’étonnant à ce que l’absence l’efface enfin ; et vouloir que l’on m’aime par force, cela n’est pas généreux, cela n’est pas la loi d’amour. Hélas ! malheureuse, Albano a changé ! Les hommes auxquels nous vouons notre cœur nous vantent leur fidélité, leur constance. Si nous changeons, nous autres femmes, nous n’avons pas