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ERNEST

— Sa mère, ris pas avec ça. C’est plutôt triste, parce qu’on est payé pareil pis, pendant ce temps-là, le travail, lui i’ avance pas.

(Il met le pied sur une chaise pour se déchausser.)

— Quand on a vu venir la pluie de l’est, le foreman nous a dit qu’on pouvait tout lâcher, rapport qu’avec l’est, on n’peut jamais dire combien de temps ça va durer… C’est ben sacrant pareil, le père Lauzon qu’a pas encore rentré son foin !…

MARIE, l’interrompant.

— Ben, si i’ mouille tant que ça, tu devrais ben, mon vieux, aller quérir du bois dans la shed ; celui qui est dehors s’allumera pas pour ton souper, à soir.

ERNEST, continuant à se déchausser.

— T’es ben pressée, sa mère, i’ est pas quatre heures… J’irai, j’irai, aie pas peur !

(En chaussette, il se dirige vers la chambre à coucher. Marie porte la main à sa bouche pour étouffer un cri. Puis, avec assurance.)
MARIE

— Où ce que tu vas, donc ?

ERNEST

— J’vas m’changer. T’as pas envie que j’attrape du mal ! J’sus pas venu en carrosse, moué, de la grange au père Ménard !…

MARIE

— Va donc quérir du bois avant, son père. Tu vas tout te remouiller encore, tout à l’heure…