Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/15

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l’aristocratie anglaise devait-il ensevelir et voiler à toute curiosité ? bien des bruits contradictoires ont couru depuis au sujet de cette lady Mordaunt, dont l’étrange aventure fut le grand événement de ma première jeunesse et pendant dix années la conversation de cette somnolente petite ville ; mais celle qui devait préoccuper jusqu’à la passion l’imagination, cependant si calme, de toute une société de province, est demeurée mystérieuse et l’épitaphe de sa tombe, la tombe, qui pour tant de disparus a remplacé le puits antique et légendaire d’où sort la Vérité toute nue, l’épitaphe de sa tombe n’a même pas trahi son secret.

C’était par un de ces temps clairs et gris d’octobre, dont on dit communément en Normandie qu’il fait un temps à retenir les hirondelles ; je me trouvais errant avec ma bonne par les pelouses de Sonyeuse, non loin d’un grand massif de dahlias doubles, aux énormes fleurs tuyautées, encore tout emperlées de l’eau d’une averse tombée le matin, et mon jeu d’enfant consistait même à secouer l’une après l’autre toutes ces grosses collerettes au-dessus d’un vieil arrosoir ; ma bonne