Page:Lorrain - Buveurs d’âmes, 1893.djvu/199

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pâle et son visage mince si désespérément las !

La pauvre femme connaissait-elle la vie menée par son beau Georges ! l’existence des gens de Presse a de telles exigences qu’il pouvait en somme la payer de défaites ! mais daignait-il sauver les apparences ? se donnait-il seulement cette peine ? ne découchait-il pas des quatre et cinq fois par semaine ! Combien souvent ne nous étions-nous pas rencontrés déjà cet hiver, à la gare Saint-Lazare, au triste et lamentable train de six heures du matin, le train des cottes et des blouses, compartiments de seconde, celui des habits noirs et des pelisses fourrées, compartiments de première, départ d’ouvriers et retour de noceurs.

Bref, je m’étais mis en tête cette légende que ma pâle voisine de la rue Michel-Ange mourait beaucoup moins de son mal que des infidélités de ce mari viveur, et mon antipathie pour Saintis (antipathie dans laquelle entrait certainement un peu de haine méprisante pour l’insoucieux bâcleur de copie, indifférent aux lettres et à tout effort d’art) mon antipathie grandissante pour Saintis s’aggravait de toute la sympathie (la sympathie, de tous les sentiments le plus impitoyable, comme a écrit