Page:Lorrain - Buveurs d’âmes, 1893.djvu/240

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et des commandes dans des milieux honorables.

Donnez-moi de l’argent, car j’aime bien ma sœur !

La robe de bal de Nini Bat-Jour pour la fête des régates de Saint-Valéry-en-Caux, tout l’atelier, non, toute la bande des amis y avait travaillé. Une robe japonaise en crépon gris de cendre (trente francs au Mikado), que Roberts avait retroussée et ajustée lui-même sur vingt mètres de tulle à travers lesquels ils avaient tous fignolé de leur plus joli coup de pinceau des roses trémières jaunes…, les bras nus et coiffée à la vierge sans un autre bijou que deux chaînes de montre dans ses cheveux tressés…

Elle était divine, le soir, la petite Nini, la Fille du Régiment, comme ils l’appelaient ; aussi, pour la conduire au bal, ils s’étaient tous cotisés…

La voiture de Master et de miss Roberts est avancée.

Et lui, Roberts, de frais rasé, insolent de fraîcheur avec son teint d’anglo-saxon et ses cheveux auburn, s’était installé bien ganté, en habit, cravate blanche, dans la calèche qu’ils avaient tous payée de leurs deniers…

Comme c’était loin… ! Il l’avait d’ailleurs un