Page:Lorrain - Buveurs d’âmes, 1893.djvu/64

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ses frères, dont l’aîné à califourchon sur ses épaules de géant.

C’est le bourdon de l’abbaye qui le matin nous a éveillés. Miss Holly a tenu à prendre la patache sonnante de ferraille, qui fait le service de la poste, et c’est juchés sur la banquette du haut, entre nos bagages et des sacs de pommes de terre, que nous avons vu émerger un à un des brumes matinales traînant sur la rivière les toits pointus et veloutés de mousse de Saint-Valery, de Saint-Ouen, Colleville et Rouxmenil, tous pays à moulins… et, le long du chemin, des histoires et des histoires.

À Valmont, la gaîté d’oiseau mouillé secouant éperdûment ses ailes au soleil de ma gazouillante compagne s’est soudain apaisée, et son babil éteint. Je lui en ai su gré. C’est à pas lents et en silence, que nous avons visité le vivier et ses dessous-bois. Miss Holly est une marcheuse émérite, elle m’a fait faire deux lieues dans la vallée, arrêter trois minutes devant un petit jardinet planté de fèves et de tournesols avec, adossée à un talus, une longue et basse chaumière, celle de ses parents, et elle a même paru réfléchir un moment, le coude appuyé à la barrière, tout à coup devenue