Page:Loti, Matelot (illustration de Myrbach), 1893.djvu/233

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gereux ouvrage ; les pauvres grosses mains rudes, les ongles durcis et courts, peinaient, en crissant, sur la toile mouillée des huniers qu’on mettait au bas ris. Et tous les visages se hâlaient, saisis et brûlés par le premier froid.

Dans le « mouroir » fermé, qui dansait lourdement avec des sauts et des retombées horribles, les deux qui étaient si malades agonisèrent la nuit suivante.

Lui, Jean, fut pris du tremblement de la grande fièvre ; mais il continua de vivre, avec des alternatives de chaud délire et d’accablement extrême — où son souffle à peine perceptible et les battements ralentis de son cœur simulaient la mort…

Oh ! la lettre, la lettre pour sa mère, qui n’était pas écrite !… Cela devint sa préoccupation, à peine définie parfois, mais constante, même dans son sommeil — et si désolée !… En demi-rêve, toujours il s’imaginait lui écrire, croyait voir une feuille de papier sur son lit, une plume entre ses doigts, et des caractères qui se traçaient, lui disant sa détresse et son adieu. Et puis, tout à coup réveillé, il