Page:Loti, Matelot (illustration de Myrbach), 1893.djvu/85

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car l’hôtel coûtait trop, — ils se décidèrent pour un logis au troisième étage dans la Grande-Rue, non loin du port. C’était triste, triste ; cela ouvrait sur une cour profonde et désolée. Une seule fenêtre regardait la rue ; on voyait de là, tout en bas, piétiner sur la boue des passants en sabots, qui, le dimanche, titubaient ; dans le lointain, apparaissait un peu de l’arsenal, et un coin de la caserne des matelots sur la colline de Recouvrance ; partout, de hautes et massives constructions de granit, aux nuances très foncées, luisantes de pluie.

Ils se disaient qu’ils changeraient plus tard, qu’ils tâcheraient de trouver mieux ailleurs. Ce fut d’abord comme provisoirement qu’ils s’installèrent, complétant, avec le plus d’économie possible, le peu du mobilier provençal qu’ils n’avaient pas eu le courage de vendre. Et, quand les caisses, venues par petite vitesse, furent montées et ouvertes ; quand les chers objets rapportés de là-bas commencèrent à reparaître, à la lumière grise d’ici, entre les murs du logis d’exil, Jean et sa mère,