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Page:Loti - Aziyadé.djvu/106

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partir avec tant d’ivresse du fond d’un cœur pur de jeune femme ; tellement, qu’il me semble ne l’avoir entendue jamais ; tellement qu’elle vibre comme un chant du ciel dans mon âme blasée…

Alors, je la soulevai dans mes bras, je plaçai sa tête sous un rayon de lumière pour la regarder, et je lui dis comme Roméo :

— Répète encore ! redis-le !

Et je commençais à lui dire beaucoup de choses qu’elle devait comprendre ; la parole me revenait avec les mots turcs, et je lui posais une foule de questions en lui disant :

— Réponds-moi !

Elle, elle me regardait avec extase, mais je voyais que sa tête n’y était plus, et que je parlais dans le vide.

— Aziyadé, dis-je, tu ne m’entends pas ?

— Non, répondit-elle.

Et elle me dit d’une voix grave ces mots doux et sauvages :

— Je voudrais manger les paroles de ta bouche ! Senin laf yemek isterim ! (Loti ! je voudrais manger le son de ta voix !)