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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/100

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Remontés dans nos barques, nous suivons doucement la sainte rive, vers l’Ouest, dans la direction de Bethsaïda. Et maintenant, peu nous importe l’imprécision de nos conjectures sur le gisement des villes disparues ; ces bords du lac de Tibériade nous restent, comme un temple inviolé du Grand Souvenir. Depuis l’époque où Jésus enseignait ici même les pêcheurs galiléens, la Terre a eu beau parcourir des espaces inconcevables, entraînée dans l’orbite inconnue de son soleil, ce point particulier de sa surface s’est maintenu sans changement ; les conditions géologiques n’y ont pas été modifiées, les petits caps, les paisibles petites baies s’y découpent aux mêmes places, entre leurs éternelles ceintures de joncs et de lauriers-roses ; les mêmes fleurs et les mêmes bêtes y renaissent à tous les printemps. Ainsi, c’était là, un peu partout sur ces bords, au hasard de la brise dans les voiles : des pêcheurs se groupaient en petites flottilles le soir, autour de Celui qui disait des choses inouïes et merveilleuses ; à terre, des foules accouraient aussi, et alors on approchait les barques jusqu’à la lisière des herbes, pour permettre à tous d’entendre. Et peu à peu, une simple association d’hommes des champs ou de la mer se formait autour du Nazaréen, oubliant tout pour