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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/102

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même, ou tels outranciers qui stupidement brisent partout sa croix, ne sont en somme que ses disciples, à peine plus dévoyés que certains prêtres d’intolérance et d’obscurité ; il a été plus subversif qu’eux tous, mais il a énoncé le vrai précepte de paix et de moindre souffrance, qui n’avait jamais été écouté avant lui sur la terre et qui seul pourrait calmer encore nos tourmentes modernes : Aimez-vous les uns les autres…Quel silence aujourd’hui, sur ces rives, quel sommeil de mort pèse sur ce berceau du monde !… Voici bientôt le midi brûlant, et nos barques se traînent, de plus en plus alourdies, sous un écrasement de lumière et de chaleur, le long des roseaux, au bourdonnement des mouches. Nous subissons la grande oppression muette des solitudes et des ruines… Il disait des choses inouïes et merveilleuses !… Et c’était là, dans ces petites baies redevenues désertes depuis des siècles, où nous passons seuls, n’éveillant que les myriades de libellules endormies sur les joncs. C’était aux époques où cette Galilée, qui n’est plus, vivait d’une vie jeune, à la fois intense et naïve ; des villes et des sociétés humaines, que nous ne nous représentons pas, fermentaient à son souffle ; en l’écoutant, s’extasiaient et rayonnaient