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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/145

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à s’ouvrir peu à peu aux voyageurs et aux idées d’Occident… Voici une heure bientôt que nous cheminons dans les fleurs, au bruissement des eaux courantes, au chant des pinsons, des merles et des fauvettes, sous le couvert ombreux des branches, et les minutes nous durent de ne pas arriver encore à cette grande ville rose, entrevue là-bas, du désert, et puis si rapidement cachée… Une rivière est maintenant devant nous, rapide, coulant en hâte extrême comme tous les ruisseaux de cette oasis. Il y a le long des berges de jeunes peupliers frêles ; il y a surtout de surprenantes quantités de femmes turques, assises en rang serré à l’extrême bord, prenant le frais, les pieds presque trempés dans le courant ; elles sont enveloppées sous des voiles en soie des plus éclatantes couleurs, lamés d’or : des fantômes bleus, des fantômes roses ou amaranthe  ; d’autres qui sont d’un vert-céladon, d’un jaune-soufre, ou d’un orangé violent. Autour d’elles s’ébattent leurs petits, en robes, en fez, en burnous, — et c’est un éblouissement comme à la fin d’une féerie. Mais hélas ! derrière les belles voilées, peu à peu Damas se découvre : un pont en fer, une gare