Aller au contenu

Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/207

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ici en vain, comme d’impuissantes fourmis ; les blocs tombés et confondus ne se relèveraient plus… Le crépuscule nous prend, très hâtif sous le ciel noir. La blancheur des neiges du Liban, aperçues entre les colonnes des temples, devient lugubre au milieu de cet assombrissement de toutes les choses. Le berger bédouin, qui tout à l’heure se promenait en pygmée sur les hautes frises corinthiennes, rassemble ses chèvres en jouant de la flûte, et, quand il est parti, le silence profond de chaque soir se fait dans les ruines… En Judée aussi, elles étaient partout, les grandes ruines muettes ; mais, pour, la plupart, évoquant des souvenirs de la Bible ou du Christ. A Jérusalem, dans tout cet antérieur plein de tourmentes que racontaient les pierres, le Christ, presque toujours, occupait la première place ; sous les fanatismes, sous les erreurs, sous les idolâtries, c’était Lui encore que l’on retrouvait à chaque pas. Et, à le sentir si solidement assis dans les passés humains, peut-être se fortifiait d’une manière latente au fond de nous-mêmes, au lieu de s’évanouir, l’illusion encore douce, transmise par les ancêtres, d’une protection suprême émanant de lui… Mais ici s’affirment, deviennent comme palpables