Aller au contenu

Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/218

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ses yeux émerveillés disent son impatience d’atteindre ces régions des eaux et des arbres qui lui semblent le paradis sur terre. Midi. Nous sommes descendus de plus de mille mètres depuis les sommets, et il est temps de faire la grand’halte du jour. Maintenant l’air est tiède, d’une limpidité exquise ; un gai soleil achève de sécher nos vêtements et les harnais de nos chevaux. A la porte d’un petit khân encore isolé, sous des arceaux blancs, nous faisons monter une table et servir notre dernier repas de route, devant le paysage magnifique. Des collines, des bois, des villages s’étalent sous nos yeux, et la côte de Syrie, frangée d’écume blanche, s’en va se perdre dans des lointains clairs. Sur la Méditerranée, en face de Beyrouth, sont posées des choses qui, de si haut, semblent des compagnies de petits poissons grisâtres : des escadres européennes, des paquebots rapides — visiteurs de fer qui arrivent, tous les jours plus nombreux, pour bouleverser le vieil Orient à son déclin. Quand vient l’heure du narguilé, nous la prolongeons ici très longuement, n’ayant aucune hâtede remonter à cheval pour aller faire tête là bas dans la banalité de Beyrouth. D’ailleurs, malgré l’extrême bien-être physique, malgré la suavité de