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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/57

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une sorte de petit golfe fermé, vient étendre aux pieds de cette patrie de Jésus une immobile nappe verte. Et, depuis des siècles, c’est tout ce que regarde l’antique Nazareth, ces bas-fonds tapissés d’orges, ces champs resserrés entre d’arides collines. Au bord du chemin, un rocher s’avance comme un toit, forme une sorte de petite caverne qui, depuis des temps incalculables probablement, sert aux passants d’abri contre la pluie ou le soleil  ; la voûte en est toute noircie par les feux des bergers. Nous nous arrêtons là, nous aussi, pour y prendre, à l’ombre, le dîner du milieu du jour, en attendant que passent nos mulets de charge, attardés dans les terres molles de la plaine. Et, sitôt que nos tapis d’Orient sont étendus sur le sol de la grotte, cela devient un charmant lieu de repos et de songe ; les contours de l’espèce de baie de pierre sont tout lisérés d’anémones rouges qui, vues de l’ombre où nous sommes, éclatent au soleil comme du feu ; et, par cette ouverture bordée de fleurs, nous dominons un pays de fleurs, des lointains de fleurs ; un revêtement de lin rose est jeté sur les tranquilles montagnes qui s’étendent devant nous, immuables depuis les âges historiques — et jadis sans doute longuement contemplées par Jésus… Nos mulets tardent deux heures — deux heures