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Page:Loti - La Galilée, 1896.djvu/94

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Lentement, le fantôme de Tibériade s’éloigne, reflété en traînées longues dans son éternel miroir ; de loin, il reprend peu à peu l’aspect d’une vraie grande ville d’autrefois, et on y croirait, si ce n’était ce silence alentour et, sur les montagnes, ce tapis jamais foulé des herbages verts. Le désert monotone et pareil nous environne de partout, les mêmes rives, les mêmes montagnes sauvages, vides, sans une roche et sans un arbre, délicieusement vertes et calmes, sous le ciel bleu et sur l’eau bleue. Pas d’autres voiles en vue que les nôtres, à la surface immobile de cette mer qui fut jadis si peuplée et qui vit se livrer entre ses flottilles de vraies batailles navales. Et les villes, où sont-elles ? Gamala, Gergesa, Bethsaïde-Julias, Capernaüm, Bethsaïda et Magdala ?… Leurs ruines mêmes ne se voient plus !… De près seulement — nous disent les abbés qui sont aujourd’hui nos compagnons de route — on en aperçoit les dernières traces. Enparcourant ce pays dévasté, on trouve, en certains lieux, sous les foins et les fleurs, des amas de grandes pierres taillées, des peuplades de colonnes, couchées comme les morts après les batailles ; mais on ne sait plus bien à quelles cités détruites ces débris correspondent, ni quel nom leur donner. Et, ici comme partout dans