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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/105

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Une rougeur aux joues, elle avait remercié à peine de ce collier d’émeraudes, quand un nègre de service vint dire que le bey était en vue, qu’il arrivait à cheval et tournait l’angle de la plus proche mosquée. La vieille dame aussitôt se leva :

« Il n’est que temps de battre en retraite, Durdané, nous autres. Ne gênons pas les nouveaux mariés, ma chère… »

Elles prirent la fuite comme deux Cendrillons, et Durdané, se retournant sur le seuil, avant de disparaître, envoya pour adieu son méchant sourire agressif.

La petite mariée alors s’approcha d’un miroir… L’autre jour, elle était entrée chez son mari aussi blanche que sa robe à traîne, aussi pure que l’eau de ses diamants ; pendant sa vie antérieure, toute consacrée à l’étude, loin du contact des jeunes hommes, jamais une image sensuelle n’avait seulement traversé son imagination. Mais les câlineries de plus en plus enlaçantes de ce Hamdi, la senteur saine de son corps, la fumée de ses cigarettes, commençaient, malgré elle, de lui insinuer en pleine chair un trouble que jamais elle n’aurait soupçonné…

Dans l’escalier, le cliquetis d’un sabre de cavalerie, il arrivait, il était tout près !… Et elle savait imminente l’heure où s’accomplirait, entre leurs deux êtres, cette communion intime, qu’elle ne se représentait du reste qu’