Aller au contenu

Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/193

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Djénane, la seule qui se montrât de face, elle tenait sur son visage un éventail en plumes qui cachait tout, même les cheveux.


Le samedi, dans la maison mystérieuse qui les réunit une seconde fois, il ne se passa rien de tragique, et aucune fée Carabosse ne leur apparut.

— Nous sommes ici, expliqua Djénane, chez ma bonne nourrice, qui n’a jamais su rien me refuser ; l’enfant malade, c’était son fils ; la vieille dame, c’était sa mère, à qui Mélek vous avait annoncé comme un médecin nouveau. Comprenez-vous la trame ?… J’ai du remords pourtant, de lui faire jouer un rôle si dangereux… Mais, puisque c’est notre dernier jour…

Ils causèrent deux heures, sans parler cette fois du livre ; sans doute craignaient-elles de le lasser, en y revenant trop. Du reste, il s’était engagé ; c’était donc un point acquis.

Et ils avaient tant d’autres choses à se dire, tout un arriéré de choses, semblait-il, car c’était vrai que depuis longtemps elles vivaient en sa compagnie, par ses livres, et c’était un des cas rares où lui (en général si agacé maintenant de s’être livré à des milliers de gens quelconques) ne regrettait aucune de ses plus intimes confidences. Après tout, combien négligeable le haussement d’épaules de ceux qui ne comprennent