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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/22

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des griseries tristes et exquises par quoi la fuite du temps est oubliée !…

Mais c’était ici, au bord de ce golfe incolore, battu par les rafales et les ondées de l’Océan, que ses yeux s’étaient ouverts au spectacle du monde, ici que la conscience lui avait été donnée pour quelques saisons furtives ; donc, les choses d’ici, il les aimait désespérément quand même, et il savait bien qu’elles lui manquaient lorsqu’il était ailleurs.

Alors, ce matin d’avril, André Lhéry sentit une fois de plus l’irrémédiable souffrance de s’être éparpillé chez tous les peuples, d’avoir été un nomade sur toute la terre, s’attachant çà et là par le cœur. Mon Dieu, pourquoi fallait-il qu’il eût maintenant deux patries : la sienne propre, et puis l’autre, sa patrie d’Orient ?…