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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/223

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posées çà et là sur des tombes. Parfois des kiosques de marbre jetaient par leurs fenêtres une vague lueur de lampe; mais c’étaient encore des éclairages pour les morts et il valait mieux ne pas regarder là-dedans:on n’aurait aperçu que des compagnies de hauts catafalques, rongés par la vétuste et comme poudrés de cendre. Sur les pavés, des chiens, tous fauves, dormaient par tribus, roulés en boule, —de ces chiens de Turquie, aussi débonnaires que les musulmans qui les laissent vivre, et incapables de se fâcher même si on leur marche dessus, pour peu qu’ils comprennent qu’on ne l’a pas fait exprès. Aucun bruit, si ce n’est, à de longs intervalles, le heurt, sur quelque pavé sonore, du bâton ferré d’un veilleur. Le Vieux-Stamboul, avec toutes ses sépultures, dormait dans sa paix religieuse, tel cette nuit qu’il y a trois cents ans.