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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/248

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dans l’imprécision. Il n’hésita pas : ce devrait être Zeyneb, qui consentait enfin à être moins cachée, et la troisième, aussi parfaitement indéchiffrable que toujours, c’était Djénane.

Il va sans dire, ils n’échangèrent ni un salut, ni un signe. Seule, Mélek, la moins sévèrement voilée, lui sourit, mais si discrètement qu’il fallait être tout près pour le voir.

Deux autres fois encore ils se croisèrent, et puis ce fut le temps de s’en aller. Le soleil n’éclairait bientôt plus que la cime des collines et des bois : on sentait la fraîcheur délicieuse qui montait de l’eau avec le soir. La petite rivière et ses entours se dépeuplaient peu à peu, pour redevenir solitaires jusqu’à la semaine prochaine ; les caïques se dispersaient sur tous les points du Bosphore, ramenant les belles promeneuses qui, avant le crépuscule, doivent être de retour et mélancoliquement enfermées dans tous ces harems disséminés le long du rivage. André laissa partir ses amies bien avant lui, de peur d’avoir l’air de les suivre ; puis rentra en rasant le bord asiatique, très lentement pour laisser reposer ses rameurs et voir se lever la lune.