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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/258

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— Mais oui, je vous dis…

— Alors, Mélek, tu as perdu ta peine : ça n’agit pas."

Il apprit donc que Mélek, depuis quelques jours, avait entrepris des prières et un envoûtement pour obtenir sa mort, —un peu comme enfantillage et plus encore pour tout de bon, s’étant imaginée qu’il incarnait une influence hostile et maintenait André en défiance contre elles.

"Voilà, dit Djénane en riant, vous avez voulu connaître des Orientales, eh bien ! c’est ainsi que nous sommes. Dès qu’on gratte un peu le vernis:des petites barbares !

— En tout cas, pour celui-ci, vous vous trompiez bien. Mais au contraire, il rêve de vous tout le temps, le pauvre Jean Renaud ! Et tenez, sans lui, nous ne nous connaîtrions pas; notre premier rendez— vous, à Pacha-Bagtché, le jour de ce grand vent, il m’a entraîné, je refusais d’y venir…

— Bon Jean Renaud ! s’écria Mélek. Écoutez, alors emmenez-le demain vendredi aux Eaux-Douces, dans votre beau caïque, et j’irai tout exprès, moi, pour lui faire un sourire en passant…"

Dans le petit harem triste et semi-obscur, où la splendeur de ce jour d’été se devinait à peine, Djénane, plus encore que la dernière fois, faisait son sphinx et ne bougeait pas. On sentait qu’une timidité nouvelle, une gêne lui étaient venues, pour s’être trop