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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/26

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la place même où chez nous on attacherait peut-être encore le crucifix : une inscription brodée de fils d’or sur du velours vert— émir, un passage du livre de Mahomet, aux lettres enroulées avec un art ancien et précieux.

Des chansons plus éperdues que commençaient ensemble deux hirondelles, effrontément posées au rebord même de la fenêtre, firent coup à coup s’entrouvir de grands yeux, dans le si petit visage, si petit et si jeune de contours ; des yeux aux larges prunelles d’un brun vert, qui, d’abord indécises et effarées, semblaient demander grâce à la vie, supplier la réalité de chasser au plus tôt quelque intolérable songe.

Mais la réalité sans doute ne restait que trop d’accord avec le mauvais rêve, car le regard se faisait de plus en plus sombre, à mesure que revenaient la pensée et le souvenir ; et il s’abaissa même tout à fait, comme soumis sans espoir à l’inéluctable, lorsqu’il eut rencontré des objets qui probablement étaient des pièces à conviction : dans un écrin ouvert, un diadème jetant ses feux, et, posée sur des chaises, une robe de soie blanche, robe de mariée, avec des fleurs d’oranger jusqu’au bas de sa longue traîne…

En coup de vent, sans frapper, survint une personne maigre, aux yeux ardents et déçus. Robe noire, grand chapeau noir, d’une simplicité distinguée, sévère avec