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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/328

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voix sérieuse et douce, qui partait de dessous le voile noir, lui dit en pur français ce qu’il nattendait pas:

« Trop contente, hélas !… Elles napprennent que trop vite et sont beaucoup trop intelligentes. Je regrette dêtre lun des instruments qui aura inoculé le microbe de la souffrance à ces femmes de demain. Je plains toutes ces petites fleurs, qui seront ainsi plus tôt fanées que leurs candides aïeules… »

Ensuite on parla du Ramazan. Jeûne toute la journée, bien entendu, petits ouvrages pour les pauvres et lectures pieuses ; au cours de ce mois lunaire, une musulmane doit avoir relu son Coran tout entier, sans passer une ligne ; elles navaient garde dy manquer, ces trois petites qui, malgré le déséquilibrement et lincroyance, vénéraient avec admiration le livre sacré de lIslam ; et leurs Corans étaient là, marqués dun ruban vert à la page du jour.

Et puis, le soleil couché, ce sont les Iftars. Dans le sélamlike, iftar des hommes, suivi dune prière pour laquelle invités, maîtres et serviteurs se réunissent en commun dans la grande salle, chacun agenouillé sur son tapis à mihrab; chez Djénane, paraît-il, cette prière était chantée chaque soir par un des jardiniers, le seul qui fût jeune, et dont la voix de muezzin emplissait toute la demeure.

Dans le harem, iftar des femmes :