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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/403

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XLVII


Le 2 novembre, Zeyneb, qui était de veille à son chevet, se retourna tout à coup frissonnante, parce que du fond de la chambre demi-obscure, une voix s’élevait au milieu du si continuel silence, une voix très douce, très fraîche, qui disait des prières. Elle ne l’avait pas entendu venir, cette jeune fille au voile baissé. Pourquoi était-elle là, son Coran à la main ? — Ah ! oui, elle comprit tout de suite : la prière des morts ! C’est un usage en Turquie, lorsqu’il y a dans une maison quelqu’un qui agonise, que les jeunes filles ou les femmes du quartier viennent à tour de rôle lire les prières : elles entrent comme de droit, sans se nommer, sans lever leur voile, anonymes et fatales ; et leur présence est signe de mort, comme chez nous celle du prêtre qui apporte l’extrême-onction.

Mélek aussi avait compris, et ses yeux depuis longtemps fermés se rouvrirent ; elle était arrivée à ce