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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/427

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et depuis longtemps elle sétait dit que sil fallait, après qu’il serait parti pour jamais, rentrer sensevelir chez soi par un de ces couchers de soleil languides et tout en or, ce serait plus intolérable que sous la morne tombée des crépuscules pluvieux. Mais voila, par temps de pluie tout deviendrait plus compliqué et plus incertain:quel prétexte inventer alors pour une promenade, comment échapper à lespionnage redoublé des eunuques noirs et des servantes ?…

Or, la pluie sannonçait, à nen pas douter, pour tout le jour. Un ciel obscur, remué et tourmenté par le vent de Russie ; de gros nuages qui couraient bas, presque à toucher la terre, enténébrant les lointains et inondant toutes choses ; du froid et de la mouillure.

Et Zeyneb aussi, par sa fenêtre aux vitres ouvertes, regardait le ciel, indifférente à sa propre conservation, aspirant longuement lhumidité glacée des hivers de Constantinople, qui déjà lannée précédente avait développé dans sa poitrine les germes de la mort. Puis tout à coup il lui sembla quelle gaspillait les minutes utiles ; ce nétait pourtant que ce soir à quatre heures, le départ dAndré, mais elle ne se tint pas daller chez Djénane, comme elle lavait promis hier ; toutes deux avaient à revoir ensemble leurs plans, a combiner de plus infaillibles ruses, afin de passer bien exactement à lheure voulue sur ce quai des paquebots. Il demeurait encore là pour presque un