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Page:Loti - Les Désenchantées, 1908.djvu/429

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fenêtre, vers cet Eyoub et ces grands champs des morts que lon napercevrait plus den bas, ni de Galata, ni de nulle part:tout au loin, dans le brouillard, au-delà de Stamboul, quelque chose comme une crinière noire dressée sur lhorizon, une crinière de mille cyprès que, malgré la distance, on voyait aujourdhui remuer, tant le vent les tourmentait….

Après qu’il eut regardé, il descendit donc vers ce quartier bas de Galata, toujours encombré dune vile populace Levantine, qui est la partie de Constantinople la plus ulcérée par le perpétuel contact des paquebots, et par les gens qu’ils amènent, et par la pacotille moderne qu’ils vomissent sans trêve sur la ville des Khalifes.

Ciel sombre, ruelles feutrées de boue gluante, cabarets immondes empestant la fumée et lalcool anisé des Grecs, cohue de portefaix en haillons, et troupes de chiens galeux.—De tout cela, le soleil magicien parvient encore à faire de la beauté, parfois ; mais aujourdhui, quelle dérision, sous la mouillure de lhiver !

Quatre heures maintenant ; on sent déjà baisser le jour de novembre derrière lépaisseur des nuages. C’est lheure officielle du départ, — et lheure aussi où doit passer lentement la voiture de Djénane pour le grand adieu. André, sa cabine choisie, ses bagages placés,