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MADAME CHRYSANTÈME

Les personnes que l’on opère en ce moment sont deux dames de qualité (la mère et la fille, cela se devine), qui posent ensemble, en carte-album, avec des accessoires Louis XV. Les premières grandes dames de ce pays que j’aie vues de si près, un groupe bien étrange : longues figures de la classe noble, atones, anémiques, bleuâtres à force de poudre de riz, avec la bouche peinte en forme de cœur, au carmin pur. Du reste, une distinction incontestable, qui s’impose même à nous, malgré la différence profonde des races et des notions acquises.

Elles toisent Chrysanthème avec un assez visible dédain, bien que sa toilette soit aussi comme il faut que les leurs. Et moi, je ne puis me rassasier de regarder ces deux créatures ; elles me captivent comme des choses jamais vues et incompréhensibles. Leurs corps frêles, posés avec une grâce exotique, sont noyés dans des étoffes rigides et des ceintures bouffantes dont les bouts retombent comme des ailes fatiguées. Elles me font penser, je ne sais pourquoi, à de grands insectes rares ; sur leurs vêtements, des dessins extraordinaires ont quelque chose de la bigarrure sombre des