Page:Loti - Madame Chrysanthème, 1899.djvu/299

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
283
MADAME CHRYSANTHÈME

route aux lanternes, suivis des trois dames contristées qui nous reconduisent ; par des pentes extrêmes, dangereuses dans cette obscurité, nous descendons vers la mer…

Les djins contretiennent de toutes leurs forces, en raidissant leurs jambes musculeuses : ces petites voitures chargées descendraient bien toutes seules, beaucoup trop vite, si on les laissait faire, et se lanceraient dans le vide avec mes bibelots les plus précieux. Chrysanthème marche à côté de moi et m’exprime, d’une manière douce et gentille, son regret que l’ami si fabuleusement haut n’ait pas offert de me remplacer pour le service jusqu’au matin, ce qui m’aurait permis de passer cette dernière nuit sous notre toit :

— Écoute, dit-elle, reviens demain dans le jour, avant l’appareillage, me dire adieu ; je ne retournerai chez ma mère que le soir ; tu me trouveras encore là-haut.

Et je le lui promets.


Elles s’arrêtent à certain tournant d’où l’on découvre à vol d’oiseau toute la rade : les eaux noires, endormies, reflétant d’innombrables feux