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MADAME CHRYSANTHÈME

clairement qu’aujourd’hui. Et, plus que de coutume encore, je le trouve petit, vieillot, à bout de sang et à bout de sève ; j’ai conscience de son antiquité antédiluvienne ; de sa momification de tant de siècles — qui va bientôt finir dans le grotesque et la bouffonnerie pitoyable, au contact des nouveautés d’occident.

L’heure passe ; peu à peu les siestes s’achèvent partout ; les ruelles étranges s’animent, s’emplissent, sous le soleil, de parasols bariolés. Le défilé des laideurs commence, des laideurs inadmissibles ; le défilé des longues robes de magot surmontées de chapeaux melons ou canotiers. Les transactions reprennent, et aussi la lutte pour l’existence, âpre ici comme dans nos cités d’ouvriers, — et plus mesquine.

À l’instant du départ, je ne puis trouver en moi-même qu’un sourire de moquerie légère pour le grouillement de ce petit peuple à révérences, laborieux, industrieux, avide au gain, entaché de mièvrerie constitutionnelle, de pacotille héréditaire et d’incurable singerie…

Pauvre cousin 415, j’avais bien raison de l’avoir