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MADAME CHRYSANTHÈME

Il a deviné, aux premiers mots, ce que j’attends de lui :

— Sans doute, répond-il, nous allons nous occuper de cela ; dans une huitaine de jours précisément une famille de Simonosaki, où il y a deux filles charmantes, doit arriver…

— Comment, dans une huitaine de jours ! Vous me connaissez mal, monsieur Kangourou ! Non, non, ce sera tout de suite, demain ou pas du tout.

Encore une révérence sifflante, et Kangourou-San, gagné par mon agitation, se met à passer en revue fiévreusement toutes les jeunes personnes disponibles à Nagasaki :

— Voyons, — il y avait bien mademoiselle Œillet… Oh ! quel dommage que je n’aie pas parlé deux jours plus tôt ! Si jolie, si habile à jouer de la guitare… C’est un irréparable malheur : elle a été prise avant-hier par un officier russe…

» Ah ! mademoiselle Abricot ! — Cela ferait-il mon affaire, cette demoiselle Abricot ? C’est la fille d’un riche marchand de porcelaines du bazar de Décima ; une personne d’un grand mérite, mais elle coûterait fort cher : ses parents, qui en font