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MADAME CHRYSANTHÈME

s’exercent à tirer de l’arc, il n’y a guère que nous aujourd’hui dans ce jardin, et la montagne alentour est silencieuse.

Chrysanthème, ayant achevé sa cigarette et sa tasse de thé, désire se refaire la main, elle aussi, à cet exercice de l’arc, encore en honneur parmi les jeunes femmes. — Alors un vieux bonhomme, qui est le gardien du tir, lui choisit ses meilleures flèches, emplumées de blanc et de rouge, — et la voilà visant, très sérieuse. Le but est un cercle, tracé au milieu d’un tableau où sont peintes en grisaille des chimères effrayantes dans des nuages.

Elle est adroite. Chrysanthème, c’est certain, et nous l’admirons, comme elle l’avait souhaité.

Yves, habile d’ordinaire à tous les jeux d’adresse, veut essayer à son tour et réussit mal. C’est amusant alors de la voir, avec mille mignardises et sourires, arranger, du bout de ses petits doigts à elle, ces larges mains du matelot, les poser comme il convient sur l’arc et sur la corde, pour lui enseigner la bonne manière… Jamais ils ne m’avaient paru si bien ensemble, Yves et ma poupée ; ils le sont tellement même, que je m’inquié-