Page:Loti - Mon frère Yves, 1893.djvu/347

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leurs bras forts, ils se lavaient à grande eau froide ; ils plongeaient de la tête et des épaules dans les bailles, couvraient leur poitrine d’une mousse blanche de savon, et puis s’associaient deux à deux, naïvement, pour se mieux frotter le dos.

Tout à coup ils se rappelèrent le mort, et leur chanson gaie s’arrêta. D’ailleurs, ils venaient de voir les hommes de l’autre bordée qui montaient au commandement de l’officier de quart, et se rangeaient en ordre sur l’arrière, comme pour les inspections. Ils devinaient pourquoi et ils s’approchèrent tous.

Une grande planche toute neuve était posée en travers sur les bastingages, débordant, faisant bascule au-dessus de la mer, et on venait d’apporter d’en bas une chose sinistre qui semblait très lourde, une gaine de toile grise qui accusait une forme humaine…

Quand Barazère fut couché sur la grande planche neuve, en porte-à-faux au-dessus des lames pleines d’écume, tous les bonnets des marins s’abaissèrent pour un salut suprême ; un timonier récita une prière, des mains firent des signes de croix, — et puis, à mon commandement, la planche bas-